Carton rouge pour les GIFs pendant la Coupe du monde

Publié le 19 juillet 2018

La FIFA a demandé à Twitter de retirer les GIFs et extraits vidéos publiés pendant la Coupe du monde. Les internautes ignoraient qu'ils n'en ont pas le droit.

Les amateurs de ballon rond ont vu leurs GIFs être supprimés sur Twitter.
Les amateurs de ballon rond ont vu leurs GIFs être supprimés sur Twitter.
© Clément Gruin

Les phases de poule de la Coupe du monde prenaient fin quand l’indignation surgissait sur Twitter. Les internautes découvraient que les GIFs et les extraits vidéos postés étaient supprimés par le média social.

La raison est simple. La FIFA, l’organisateur de la Coupe du monde, attribue des droits d’exploitation aux chaînes de télévisions, et estime que ces réutilisations par les internautes sont une violation de ces droits. L’organisme a demandé à Twitter de faire le ménage. Elle ne veut ni extrait vidéo, ni GIFs (ces séquences d’images qui tournent en boucle, très populaires sur les médias sociaux).

« La FIFA négocie et conclut les accords avec les médias, notamment les chaînes de télévision, qui seront autorisés à diffuser les images de la compétition. Ceci signifie qu’en principe, toute création et diffusion de GIFs à partir d’images des matchs de la Coupe du monde est soumise à l’autorisation préalable de la FIFA. »

Gaëlle Bloret-Pucci et Georgina van der Heijden, avocates spécialisées dans le droit du numérique, dans une tribune du site spécialisé “Siècle Digital”.

C’est pour cette raison que la vidéo d’une mère britannique a été supprimée. « Quand je me suis réveillé le lendemain, j’avais reçu un mail m’expliquant que la vidéo avait été supprimée, raconte Kathryn Conn. C’était juste une vidéo de mon fils célébrant le but de Harry Kane. Il voue un culte à ce joueur et il s’est mis à danser dans le salon. On peut apercevoir la télévision à l’arrière plan en train de passer un ralenti du but, mais c’est à peine visible. »

Que risquent les internautes ?

« Même si un évènement sportif n’est pas protégé par le droit d’auteur, les éléments d’habillage audiovisuel (score, statistiques…) le sont, explique Florian Viel, juriste en nouvelle technologie au cabinet Bouchara. Donc si quelqu’un rediffuse ces images, c’est considéré comme de la reproduction d’œuvre protégée. »

Pour cela, les internautes peuvent — théoriquement — être poursuivis pour contrefaçon. Ils risquent alors la réparation du préjudice et la suppression du contenu en droit civil, et jusqu’à 3 ans de prison et 300 000€ d’amende en droit pénal. « Mais je ne vois pas la FIFA aller jusque-là, tempère Florian Viel. Les internautes risquent surtout la suppression du contenue par la plateforme, et éventuellement la suspension de leur compte. Cela dépend de leur audience. »

Alors que l’image de sa célébration a été largement repris sur les médias sociaux, Michy Batshuayi lui-même a vu son GIF supprimé par Twitter.
Alors que l’image de sa célébration a été largement repris sur les médias sociaux, Michy Batshuayi lui-même a vu son GIF supprimé par Twitter.
© FIFA/DR

Par ailleurs, les associations d’internautes soulignent que les GIFs ne portent pas préjudice à la FIFA. Au contraire, elles estiment que ces extraits accroissent l’audience de la compétition. Et doivent satisfaire les sponsors, qui voient leurs marques tourner en boucle.

Mais l’action menée par Twitter peut paraitre bien dérisoire. De nombreux contenus sont toujours en ligne, en particulier pour les comptes peu suivis et les publications peu visibles. D’autant que l’usage du média social a explosé depuis la Coupe du monde de 2010.

Les contenus traitant de l’évènement sont toujours plus nombreux, tandis que l’usage de Twitter se répand à travers le monde. Le nombre d’utilisateurs actifs n’a pas autant progresser entre 2014 et 2018 qu’entre 2010 et 2014, mais la possibilité de poster des vidéos est apparue entre temps.

Pourtant, la question n’intéresse pas que la FIFA. Le milieu audiovisuel voit d’un mauvais œil la réappropriation de ses contenus par les internautes.

Un projet de règlement européen, en débat à Strasbourg en septembre, pourrait clarifier les droits et devoirs de chacun en matière de droit d’auteurs et de réutilisation de contenu sur internet. Ce sera peut-être la décision qui lèvera toute ambiguïté pour les acteurs du numérique.